Très marqué par le son et les ambiances de Godflesh, Tectonics, le précédent album du one man band parisien P.H.O.B.O.S., dressait néanmoins un paysage beaucoup plus aride, massif et dangereux, fait d'atmosphères suffocantes en totale adéquation avec les visuels et les thèmes magmatiques choisis à l'époque. Et toujours à l'honneur aujourd'hui, comme en atteste le magnifique artwork volcanico-ombilical de ce boîtier format DVD. Anœdipal n'est en rien une révolution du style P.H.O.B.O.S., toujours aussi noir et austère, il appuie seulement un peu plus la volonté d'extrémisme de son géniteur. Que l'on se plaît d'ailleurs à imaginer fan endurci de Godflesh donc, mais aussi de Voivod et Celtic Frost, trois groupes qu'il aurait choisi d'agglomérer et de radicaliser jusqu'à les faire pourvoyeurs des mêmes sévices auditifs et mentaux dont sont capables l'industriel, le black metal ou le doom/drone moderne à leur paroxysme déviant. Mais c'est aussi à Appolyon Sun, le méconnu projet métal industriel de Tom G. Warrior, que font songer les guitares de l'introductif "Unzen", tant dans le son que dans les riffs joués. La suite ne sera que crispation, étirement du temps, explosion d'apocalypses, rythmiques mécaniques massives, ambiances glauques, oppressantes et corrodantes. Dommage que le maniérisme evil black metal et la linéarité du chant tapent rapidement sur le système, car les passages purement instrumentaux se révèlent vraiment intenses et immersifs, ils valorisent même davantage les vrais tenants de la personnalité de P.H.O.B.O.S. : ces riffs hurlants, agonisants comme rarement entendus, parfois déformés jusqu'à en devenir un magma de distorsions troublant, enserrés de beats synthétiques froids s'abattant en toute fatalité. Tantôt attirant, tantôt éprouvant, Anœdipal reste une œuvre exigeante qui requiert une attention totale et stimule l'imaginaire, lui donnant accès aux mêmes univers et atmosphères que ceux générés par la musique dark ambient, mais dans un contexte définitivement physique, lourd et métallique. Au point de fusion de toutes ces noirceurs, P.H.O.B.O.S. trouve son identité.

- Olivier Drago / déc. 2008 (7,5/10)

 

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